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23 November 2024
Renard, géant d’Afrique

Renard, géant d’Afrique

Fév 9, 2015
©AFP
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Huit ans après ses premiers pas sur le continent, Hervé Renard est désormais un monument du football africain: son sacre dimanche à la tête de la Côte d’Ivoire fait de lui le premier entraîneur à remporter la CAN avec deux sélections différentes.

L’élève a dépassé le maître puisque le Français (46 ans) a fait mieux que son compatriote Claude Le Roy, vainqueur en 1988 avec le Cameroun et qui lui a offert en premier sa chance au sein de l’équipe nationale ghanéenne en 2007.

A l’époque, Renard n’était qu’un simple adjoint et apprenait encore les ficelles du métier dans l’ombre de son glorieux aîné (66 ans). Aujourd’hui, son look de beau-gosse, sa chemise blanche et son sourire carnassier sont indissociables de la CAN qu’il aura à jamais marqué de son empreinte.

En 2012 au Gabon, l’effet de surprise avait joué à plein avec la Zambie. Il avait parfaitement su utiliser le souvenir douloureux du crash aérien de 1993 ayant décimé les Chipolopolos à Libreville pour faire d’une formation de second rang une machine indestructible et lui offrir la première CAN de son histoire.

La planète football avait alors découvert un technicien exigeant avec ses troupes, amoureux du jeu et de la technique mais ne concevant pas le plaisir sans rigueur. Cette année, le défi était autrement plus corsé pour Renard: prouver qu’il a l’étoffe pour guider une équipe composée de stars et attendue à chacune de ses apparitions.

Les débuts ont été laborieux mais le natif d’Aix-les-Bains n’a jamais dévié de sa ligne, imposant une discipline tactique de fer aux vedettes ivoiriennes. Le déclic est survenu après un lourd revers à Abidjan face à la RD Congo (4-3), le 15 octobre 2014 en qualifications de la CAN. Renard, intronisé après l’élimination au 1er tour du Mondial à la place de Sabri Lamouchi, a resserré les boulons et transformé la Côte d’Ivoire en un bloc d’abord apte au combat.

Meneur d’hommes

« Quand un adversaire affronte la Côte d’Ivoire, il y a tout ce que cela comporte: trois Coupes du monde consécutives, des joueurs qui jouent dans les plus grands clubs. Mais il faut passer à des choses moins bling-bling et plus efficaces », avait-il averti au début du tournoi.

Le bilan comptable des Eléphants durant cette CAN est à cet égard édifiant. Avec 3 victoires et 3 nuls, dont la finale gagnée aux tirs au but, et neuf buts inscrits pour quatre encaissés en six rencontres, les Ivoiriens ont parfaitement assimilé les préceptes de Renard.

« Il a fallu dire certaines vérités », a-t-il avoué après son triomphe en finale contre le Ghana (0-0 a.p, 9-8 t.a.b). Ses mots ont en tout cas payé et six mois à peine après sa nomination, la Côte d’Ivoire a enfin réussi à retrouver les sommets de l’Afrique, faisant d’un coup oublier la fameuse génération dorée emmenée par la légende Didier Drogba.

Car cet obscur défenseur passé par Cannes, Vallauris et Draguignan, patron d’une entreprise de nettoyage avant de se muer en globe-trotter du football, est avant tout un meneur d’hommes. Un art qu’il a d’abord pratiqué à Draguignan avant de se placer sous le haut patronage de Le Roy et d’entamer son tour du monde.

La Chine (Shanghai) et l’Angleterre (Cambridge) lui ont servi de marche-pied avant de s’enraciner en Afrique à partir de 2007 (Ghana, Zambie, Angola, USM Alger, Côte d’Ivoire). La CAN est devenue rapidement son terrain de jeu idéal et il y est invaincu depuis 15 rencontres. Une donnée statistique qu’il n’a cessé de brandir fièrement tout au long de la compétition.

Peut-il réussir ailleurs qu’en Afrique? La Ligue 1 française a longtemps constitué son fantasme. Son expérience avortée à Sochaux, qu’il n’est pas parvenu à sauver de la relégation en 2014, lui a laissé un goût d’inachevé et l’Hexagone devra sans doute patienter. Sous contrat pour deux ans avec la Côte d’Ivoire, Renard n’en a pas encore fini avec ce continent.