Comportement de l’entraîneur : des pistes de réflexion
Je me souviens de mon premier match en tant qu’arbitre. J’étais nerveux, j’avais mal dormi la veille et pratiquement rien mangé avant l’heure fatidique. Je débute mon match comme chaque arbitre fait, c’est-à-dire en procédant à la vérification des équipes et du terrain de jeu. Étant jeune, je trouve les entraîneurs très imposants puisqu’ils sont des adultes; je ne veux surtout pas commettre d’erreurs!
Une fois la glace brisée après mon premier coup de sifflet, le match se déroule sans anicroche. Rares sont les fautes et incidents majeurs lors d’un match U-08F et les entraîneurs sont présents pour encadrer leurs joueuses afin de les éduquer aux rouages techniques du ballon rond.
En tant qu’arbitre de soccer, je ne voulais rien manquer de ce qui se passe sur le terrain. Je voulais bien faire et surtout, ne pas me tromper et être certain, à chaque fois, de mes décisions… Or, cette pression individuelle omniprésente est assez palpable chez les jeunes arbitres de soccer. Ainsi, le rôle de l’entraîneur est crucial dans l’apprentissage des jeunes officiels qui, n’ayant pas peur des mots, démontrent beaucoup de courage en se présentant sur le terrain avec deux équipes ainsi que de nombreux parents et amis du ballon rond.
Or, trop souvent les chefs arbitres reçoivent des commentaires suite à un match et ces derniers sont écrits avec émotions, relatant les « mauvaises » décisions des arbitres ou d’une application non conforme aux Lois du Jeu. Après toutes ces années, je m’aperçois que lors de mon premier match, j’avais commis plusieurs erreurs et aucun entraîneur ne m’en avait fait la remarque… Cela n’est pas dû à leur manque de connaissances dans le domaine ou par un quelconque manque d’attention, bien au contraire! J’ai rapidement réalisé que ces entraîneurs s’étaient aperçus de mes erreurs et pourtant ils n’ont pas réagi…
Cependant, avec du recul et mon expérience, je me permets d’affirmer que ce « laisser-aller » de ces entraîneurs avait été grandement bénéfique à mon apprentissage dans l’arbitrage au soccer. Ainsi, ma motivation était plus grande et je n’avais pas (ou peu) peur de commettre des erreurs puisque ces dernières font partie intégrante du développement des arbitres de tout sport confondu.
En somme, l’entraîneur de soccer se doit d’être un fier collaborateur de l’apprentissage du soccer non seulement auprès de ses joueurs et joueuses, mais également auprès des jeunes officiels qui débutent dans le domaine.
Trop souvent de jeunes arbitres quittent l’arbitrage en raison de commentaires d’entraîneurs qui arborent une interprétation différente des règlements. C’est tous ensemble (entraîneurs, joueurs, parents et arbitres) que nous réalisons des apprentissages du ballon rond, et ce, tant du côté humain que ludique.
Jean-Philippe Provost
Notes sur l’auteur
Jean-Philippe Provost est directeur de l’arbitrage à l’association de soccer de Beauport depuis 2009. En plus d’être évaluateur et instructeur d’arbitres, l’auteur est mathématicien spécialisé en enseignement collégial et poursuit présentement des études supérieures en didactique des mathématiques à l’Université Laval.